"Mêlées", ces remarques ne sont cependant pas de simples miscellanea, encore moins des fonds de tiroir: elles ont une unité et une importance. Elles ont aussi une autorité et un charme. L'unité, à travers tous les thèmes et au long de trente-sept années (1914-1951), est celle d'un "esprit", invoqué comme tel, au croisement du "subtil" (viennois) et du "brûlant" (juif) : dans les deux cas, à l'opposé de l'esprit de la science et de la culture européo-américaine. Là est aussi, certainement, l'importance majeure de ce texte.

Son autorité, elle, vient de cette "autre lumière" qui s'ajoute à "la belle lumière du travail", comme le dit L. W., et où se reconnaît (ce qu'il ne dit pas) une élévation morale dont je ne connais pas d'équivalent, sauf, peut-être, Lagneau et Simone Weil. Le secret étant que, par ce qui est nommé ici "courage" (Mut), cette élévation morale est aussi l'unique principe de l'éclaircissement analytique, l'unique objet et l'unique passion de la pensée wittgenstei­nienne. Quant au charme, on le trouvera, bien entendu, dans l'évo-cation des figures viennoises: Bruckner, Kraus, Labor, Loos, Weininger, Drobil et un certain Freud, mais aussi dans les no­tations sur la musique, sur les gares anglaises en 1942, sur les enfants (très proches des philo­sophes), sur l'humour.

G.G.